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Marcelin Pleynet est né en décembre 1933 à Lyon. Pas de vie de famille. Mis en pension très jeune, il s'en échappe dès que possible. Voyage à travers la France. Divers métiers. Études fragmentaires et anarchiques. Voyage en Italie, en Hollande, en Angleterre. Publie son premier volume de poésie en 1962 : Provisoires amants des nègres, le titre choque les imbéciles. Le livre est accueilli par Giuseppe Ungaretti, Jean Paulhan, René Char, Louis Aragon et obtient, la même année, le prix Fénéon de littérature. Marcelin Pleynet est nommé directeur gérant et secrétaire de rédaction de la revue Tel Quel au printemps 1963, poste qu'il occupera jusqu'en 1982. Il devient alors secrétaire de rédaction de la revue L'Infini dirigée par son ami Philippe Sollers et publiée aux éditions Gallimard. Invité comme visiting professor de littérature par l'université de Northwestern à Chicago, où il fait un cours sur Lautréamont, en 1966. Si l'essai qu'il publie sur Lautréamont, en 1967, a une incontestable influence sur l'évolution ultérieure de Tel Quel, son œuvre ne s'en établit pas moins très en marge de ses activités publiques (éditoriales), et plus généralement en marge des divers regroupements et familles poétiques de l'époque. En 1971, il publie un ensemble d'essais sur l'art moderne, L'Enseignement de la peinture, (vite traduit au Japon, en Espagne, en Italie et aux États-Unis) qui lui vaut une renommée de critique et d'historien d'art dont il ne parviendra jamais tout à fait à se défaire. C'est ainsi qu'à sa création, la chaire d'esthétique de l'École nationale supérieure des Beaux-Arts de Paris lui sera confiée et qu'il ouvrira alors son cours (1987) par une suite de conférences sur la poétique d'Homère. En compagnie de Roland Barthes, Julia Kristeva, Philippe Sollers et François Wahl, il participe au printemps 1974 à une des premières randonnées d'intellectuels français en Chine. Il en revient fatigué et plus que jamais convaincu que « la poésie qui discute les vérités est moins belle que celle qui ne les discute pas ». En 1986, il raconte sa vie dans un roman, Prise d'otage, que la société parisienne, qui croit s'y reconnaître, prend pour un roman policier. CQFD. La vie d'un écrivain n'est jamais riche que de malentendus : voir les six volumes de son Journal intime (aux éditions Hachette, Plon et Gallimard). Notice rédigée en 1988 et revue en 2003. |
La beauté
L'avion qui vole, me semble-t-il, exceptionnellement bas, vient de passer au-dessus des Pyrénées. Je suis, comme chaque fois que je fais ce voyage, stupéfait par la grandiose beauté du paysage. Qui la dira ? Qui la décrira jamais ? Nous traversons ces montagnes qui coupent nos deux horizons en moins de quinze minutes. Rien n'est comparable à la splendeur de ce déroulement… aucune œuvre humaine ne peut rivaliser avec ce chef-d'œuvre naturel… Il y faut bien entendu l'avion, mais comme la misère et la tristesse de cet appareil, comme ses miraculeuses prouesses s'oublient vite en présence de ce monde vivant, fini et infini, de formes et de couleurs que magnifient les quatre éléments.
À l'altitude où nous sommes, les forêts qui montent à l'assaut de la montagne ne sont que de vastes manteaux sombres posés sur les épaules de lourds géants assoupis dans la blancheur neigeuse des cimes, et dont les membres étendus, dispersés par un sommeil qui n'a pas d'âge, se drapent plus bas de la délicate transparence perlée du brouillard. Sur l'ocre brun de leurs flancs, découpés d'une suite infinie de ravins et de falaises, sinue le fil clair des torrents et des rivières dont les lignes bleues aboutissent à des lacs grands comme des points d'exclamation, et où plonge notre ciel… Tout cela dans la mouvance désormais figée d'un monde, de dessins et de volumes, refermé sur la beauté d'une immensité sans partage…
Extrait du journal de l'année 1981, Le jour et l'heure, coll. « POL », Hachette, 1989.
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Bibliographie sélective
Poétique de Jean Miotte
"En Puisaye" cahier n° 1.
éditions RLD 1996
(diffusion Art Point France)
Bibliographie
Critiques d'art et essais
Comme la poésie la peinture, Editions du Sandre / Editions Marciana, novembre 2010
Cézanne et l'infini, Gallimard, Coll. "Folio essais", 2010
Giacometti , le jamais vu, Dilecta, 2007
Cézanne Marginal, Les Mauvais Jours, 2006
Le savoir-vivre, Gallimard, 2006
Alechinsky le pinceau voyageur, Gallimard, 2002
Rothko et la France, L'épure Eds, 1999
Rimbaud en son temps, Gallimard, 2005
Judit Reigl, L'insolite-Adam Biro, 2001
Les voyageurs de l'an 2000, Gallimard, 2000
Poésie et "révolution", la révolution du style, Pleins Feux Eds, 2000
Chardin - Le sentiment et l'esprit du temps, L'épure Eds, 1999
Rothko et la France, L'épure Eds, 1999
Notes sur le motif suivi de La Dogana, Dumerchez Naoum, 1998
L'homme habite poétiquement, Actes Sud, 1998
Une saison, Dumerchez Naoum, 1996
Henri Matisse, Gallimard, 1993
Les modernes et la tradition, Gallimard, 1990
L'Art abstrait, tome 5 (avec Michel Ragon), Adrien Maeght, 1988
New-York Series, les sculptures en cire de Félix Rozen, galerie Gary, Paris, 1979/88
Les États-Unis de la peinture, Seuil, 1986
Fenêtre sur le Japon, exposition de photographies de Félix Rozen, Central color Paris, 1986
La place de Félix Rozen dans l'art contemporain (Situation pièce, Centre d'Action Culturelle, Saint Brieux, texte lu par l'auteur), 1984
Lautréamont, Seuil, 1967
Poésie
Le Pontos, Gallimard, 2002
Premières poésies, Cadex, 1988
Fragments du chœur - vers et proses, Denoël, 1984
Le propre du temps, Gallimard, 1995
Rozen Black Tracks. Catalogue de l'exposition Félix Rozen (Silkeborg Kunstmuseum, Danemark et Fondation Henie-Onstad, Norvège). Préface de Troels Andersen poèmes de Peter Laugesen et Marcelin Pleynet, mai/juin 1981
Stanze, Seuil, 1973
Romans
Chronique vénitienne, Gallimard, 2010
La fortune, la chance. Chroniques romanesques, Hermann , 2007
La vie à deux ou à trois, Gallimard, 1992
Prise d'otage, Gallimard 1986