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En 2007, Sur la musicalité du vide a été couronné par le Prix des découvreurs. Matthieu Gosztola est le plus jeune poète à recevoir le Prix des découvreurs qui a récompensé nombre de poètes contemporains de renom : Pascal Commère, Gérard Noiret, Valérie Rouzeau, Mohammed Dib, Ludovic Janvier, Eugène Savitzkaya, Olivier Barbarant, Ariane Dreyfus, André Velter… Dans les Cahiers pédagogiques, Sur la musicalité du vide est cité comme étant l'un des quarante livres permettant de « découvrir la poésie d’aujourd’hui ». Des poèmes ont été lus par des comédiens sur France Culture à l’occasion de la parution du premier volume de ce diptyque. Michaël Bishop dans The French Review résume le projet de celui-ci : « Sur la musicalité du vide, premier livre de Matthieu Gosztola s’offre (...) comme un vaste réservoir d'observations et d'évocations, d'aphorismes et de notations inclassables. Fragmentation et accumulation rivalisent tensionnellement ; le continuum qui en résulte, kaléidoscopique, jamais contextualisé, ne véhicule aucune épistémologie stable; seul l’espace du poétique affirme implicitement l’idée d’une cohérence au cœur même d’une implosion textuelle qui s’avère antirationaliste, féerique, spontanément sinueuse, totalement libre, aveuglante. » Dans le septième numéro de Cahier critique de poésie, Christophe Samarsky résume quant à lui le projet de Sur la musicalité du vide II : « Ce dont les choses sont nées, ce par quoi, une fois nées, elles vivent, ce à quoi elles font retour à la mort, tâche de comprendre », demandent les Upanishads. M. Gosztola y répond singulièrement, nullement amer, nouant ensemble la pleine transparence de l'instant, quelques rides sur l'eau, un hoquet. » Matthieu Gosztola choisit en 2008 d'explorer la relation passionnelle et tumultueuse entre Auguste Rodin et Camille Claudel en usant de la forme poétique et de la photographie (in Recueil des caresses échangées entre Camille Claudel et Auguste Rodin, Editions de l’Atlantique). En 2010, il fait paraître un livre de poèmes sur le génocide qui a eu lieu au Rwanda en 1994, dans lequel il fait, selon Ouest-France, entendre « l’écho inapaisé de[s] paroles suppliciées ». Il répond à cette occasion sur Poezibao à la question « écrire un recueil de poèmes à propos d’un génocide, cela a-t-il un sens ? ». Antoine Emaz (toujours dans Poezibao), après avoir rappelé qu’il n’y a « [a]ucun pathos dans le livre de Gosztola, mais (…) du relief, de la rugosité de langue », souligne la « structure très forte du livre » et met en avant « l’impression (…) de maîtrise (presque savante, ciselée dans le détail) » qui s’en dégage. Selon lui, cette œuvre va « poétiquement contre l’inhumain, sans concession aucune au voyeurisme morbide ou au goût pervers pour l’horreur. » Le Magazine des Livres résume quant à lui le projet de Matthieu Gosztola : « L’action poétique de Matthieu Gosztola en son livre Débris de tuer est incontestable. (…) A la suite d’un Paul Celan reconstruisant une langue en dedans même du génocide des juifs et y cherchant la voie d’un chant praticable, (…) Matthieu Gosztola déplie sous nos yeux décillés la carte d’un Verbe violemment démembré, y cherchant les traces d’un vivier humain de l’au-delà de la souffrance, d’un chant donnant accès à la compréhension. (…) Gosztola, debout au milieu du charnier verbal, entend les saignements intérieurs qui montent depuis la terre rwandaise jusqu’à l’homme tout entier, il recueille dans sa bouche le souffle de l’agonie, faisant ainsi de sa gorge un passeur (…). » Il ne se limite pas à des parutions d’ouvrages mais a publié ses poèmes « dans une centaine de revues littéraires », françaises comme Caravanes, Voix d'encre, Phréatique, Encres Vagabondes ou Salmigondis, belges comme L’arbre à paroles, Archipel, ou encore Ecritures canadiennes comme Moebius ou Art le Sabord… Ses poèmes sont parus dans des anthologies, comme au Cherche Midi ou chez Donner à voir. Des numéros de revues lui ont été consacrés : Soleils et cendre et Verso. Ses poèmes ont été traduits en anglais et publiés dans la revue Silver Visions II Visions-International aux États-Unis. Il a écrit des articles pour la Comédie-Française, pour les Presses Universitaires de Rennes... : il a fait paraître des articles sur Jarry, Valéry, Reverdy, ou encore sur le lien qui existe entre la littérature et les sciences à la fin du dix-neuvième siècle. Il a participé à l’édition critique des œuvres de Raymond Roussel et à des colloques internationaux à Paris, à Laval, en République Tchèque et en Suisse. Il prépare actuellement une édition critique des œuvres d’Alfred Jarry pour les éditions Classique Garnier. Il a été critique littéraire pour la revue Histoires Littéraires. Il est actuellement critique pour La Vie littéraire. Il publie des proses, en livre ou en revue, depuis 2009. Il est également photographe. Il a publié quelques-unes de ses photographies dans des revues comme Le Jardin d’Essai, Verso ou Contre-allées et a fait paraître un livre de photographies et de poèmes aux éditions de l'Atlantique.
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Extraits
Chaque matin
La veuve emplit deux tasses
Chaque matin
Elle vide le contenu d'une tasse
Dans l'évier
Le corps debout dans la cuisine
Elle égrène un chapelet de groseilles
Il y a quelques jours encore
Tout était à sa place
Au réveil
J’ai assisté impuissant à
La dispersion des feuilles de mon arbre
Dans le vent jaune
Elle est belle
À en vivre Chaque jour
Elle m’apporte l’envie
Sur sa robe
Sur la chaise l’empreinte
De mes doigts
Tu adresses timidement quelques mots à la serveuse
(ta commande)
Elle s’approche trop près, te frôle (caresse ton âme)
Tu te réveilles entre ses bras humides
Pour s’expliquer, elle dit avoir retrouvé en toi
La couleur inimitable des yeux de son père
Les tranches dans mon chocolat
Au réveil
Si elles n’ont pas le goût de tes lèvres
Ne passent pas
Il n’y a jamais assez de tendresse
Pour un homme rongé par l’idée du dernier voyage
Mes mains
Sur tes paupières
Ferment le jour
Tu t’approcheras dans une robe légère
Pour prendre la mesure
De ma solitude
Hier
Nous avons refait une pioche
Après avoir mal distribué les caresses
Humer l’espace autour d’une fleur
Se souvenir des choses
Qui n’auront lieu que demain
Mettre le feu à notre vie
Pour que la partie qui ne brûle pas
Nous apparaisse
Deux pétales rapprochés avec le pied
Un improbable papillon
Suicide
L’homme attend pour plonger
Que son ombre soit prête
Un coquelicot :
Des fragments de papier japon
Cousus entre eux
Puis agrafés au vent
Ce matin
Ecrasant la pelure d’un oignon
Le sentiment de distraire
L’ordre des choses
L’instant est commun :
Un clarinettiste à la fenêtre
Tire sur la jupe du réel
Rendant rêche un côté de la chaise
J’invente un sexe à ton souvenir
Il y avait toi et rien ne manquait
Il y avait même beaucoup plus
Il restait quelque chose
Quand tu n'étais pas là
Le mercure sous la main
Te prendre la main
Apportait une terrasse
Aux lieux
Où nous étions
Quand nos caresses se regardaient dans un miroir
C’était toujours toi qu’elles voyaient
Personne
Ne pouvait apparaître davantage
Les caresses nous prennent la bouche et les mains
Pour parler
Les caresses nous enlèvent
Puis nous reposent sur le lit
Portés par nos caresses
Nos visages nous deviennent familiers
Nos caresses sont des voleurs de menthe
Nos caresses changent le papier peint
Des pièces où nous faisons l'amour
La lumière démise
Dans une caresse
La lumière se dévide dans nos caresses
Nos caresses font de chaque instant
La plus haute syllabe de l’été
Fulgurance d’une caresse
Portant la nuit à notre oreille
Publications
Sur la musicalité du vide, Atelier de l'agneau, 2001.
Travelling, Contre-allées, 2001.
Les Voitures traversent tes yeux, Contre-allées, 2002.
Sur la musicalité du vide 2, Atelier de l'agneau, 2003. Prix des découvreurs 2007.
Matière à respirer, Création et Recherche, 2003. Livre d'art en collaboration avec le photographe plasticien Claude Py.
Recueil des caresses échangées entre Camille Claudel et Auguste Rodin, Éditions de l'Atlantique, 2008. Photographies et poèmes agrémentés d'un dessin à l'encre de Chine de Zuzanna Walas.
J'invente un sexe à ton souvenir, Minuscule, 2009.
Une caresse pieds nus, Contre-allées, 2009.
Débris de tuer (Rwanda 1994), Atelier de l'agneau, 2010.