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Antonio Segui est néen 1934 à Cordoba en Argentine. Entre 1951 et 1954, il voyage en Europe et en Afrique et étudie la peinture et la sculpture en France et en Espagne. 1957 est l'année de sa première exposition individuelle en Argentine. Il voyage alors à travers l’Amérique du Sud et l’Amérique Centrale, séjourne au Mexique où il étudie toutes les techniques de la gravure. En 1961, il retourne à Buenos Aires. En 1963, il s’installe à Paris, puis à Arcueil, où il vit actuellement.
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Sueños Escondidos – Acrylique sur toile – 55 x 36 cm – 1999 – photo André Morain
Segui. Le regard trompeur.
"Seguí dessine, des petits personnages sautillants, cernés par une ligne claire et ferme, inspirée par les contours de silhouettes qu’il découpe parfois dans des planchettes de bois. Tous ces êtres sont en marche, visiblement pressés, assurément sans but. "
On a tendence à réduire trop vite l'univers de Segui à une allégorie d'un monde moderne , dont il faudrait dénoncer la vacuité , la part d'absurde. Or il faut aussi savoir accorder un peu de tendresse à ses urbains qui sont de beaux acteurs de leur vie . Il faut prendre le temps de s'amuser avec l'artiste de nos comportements sur fond de ville. Une ville qui grouille d'activités, d'informations mais dont les immeubles, le mobilier, les arbres, sont le plus souvent réduits à la taille de jouets dans ses toiles, ses gravures. Les personnages qui habitent ses cités ne sont pas "petits". Le premier regard est trompeur. Tout en jambes, ils dépassent pour la plupart le toit des immeubles.
Isolé, le chapeau vissé sur la tête et marchant à grand pas, en foule grouillante, l'homme de Segui conjure la mort à tous les carrefours. Il prend son existence au sérieux. Plein de vitalité, il cache dessous les costumes qui l'habille de solitude une part de rêve.
Françoise Monnin, historienne et critique d'art a rencontré l'artiste dans son atelier à Arcueil en mai 2006, elle nous rapporte ses propos :
"Actuellement, il achève un nouvel ensemble de toiles, dont la composition est construite en larges bandes, ici, multicolores, là, sombres. « Le soleil ne sort pas pour tout le monde », tel est le thème, inspiré par un vieux film de Vittorio de Sica, Miracle à Milan, revu récemment ; un film dévoré une première fois durant l’adolescence, et jamais revu depuis.
Tout souvenir est enfance « L’essentiel de ma peinture jaillit automatiquement, de mon enfance. Je fais ce que je peux. Sans intention d’être un peintre argentin, ni même sud-américain. L’Argentine ? Je dis toujours que j’y retournerai quand je serai grand ; quand j’arrêterai de fumer… En attendant, j’y
passe pas mal de temps. Je n’ai pas pu couper mes racines». Plus que tout autre lieu, les borsalinos des hommes et les décolletés des femmes qui peuplent les toiles évoquent la ville de Córdoba, à cinquante kilomètres de laquelle l’artiste, chaque année, séjourne, dans la demeure de sa grandmère.
Villas centenaires, chiens sans colliers, baignades estivales, danseurs de tangos, bien sûr... « Córdoba était, quand j’étais enfant, une cité vieille, belle, coloniale. C’était avant la construction, dans les années cinquante, de tous ces buildings qui l’ont rendu horrible ». Peindre, c’est souvent sublimer la nostalgie. Les personnages mis en scène en sont pourvus. Quasiment invisibles, fondus dans l’immensité de la planète, ils n’en dissimulent pas moins sous leurs apparences polies une palpitation réelle, pareille à celle des éléments d’architecture parfois insérés dans les compositions : des grandes maisons sages, à volets clos mais cheminées fumantes. Domestiqués, nous demeurons vibrants, comme en témoignent les codes graphiques signifiant le mouvement, constitués de quelques virgules, dont l’artiste rehausse les angles des corps qu’il dessine. Emprunts aux univers de la bande dessinée, de la caricature ou du dessin animé, ces lignes signifient que s’il y a errance, il n’y a pas moins énergie. Quand bien même l’automatisme ait remplacé l’espoir.
Être discret ne signifie pas ne pas fonctionner, respirer, voir, préserver, tout au fond de soi, une part de rêve. Ainsi raisonne l’artiste depuis 1992, date à laquelle il a posé ses valises dans une grande et belle maison ancienne de la banlieue Sud de Paris. Une façade claire et silencieuse, derrière laquelle il a entreposé les collections d’art africain et précolombien qu’il constitue depuis cinquante ans. Incroyable musée ! Contrepoison à la sensation de stérilité engendrée par l’Occident… Chacun de ces objets, en effet, intemporel, fait preuve d’une présence troublante. D’un bouillonnant silence. Installés en groupes dans toute la maison, disposés en fonction de leurs proximités d’origines géographiques et d’allures, ils constituent des foules dont « l’inquiétante étrangeté », aurait dit le psychanalyste Freud, est renforcée par la multiplication et par la juxtaposition des ressemblances. Un phénomène identique se manifeste dans la construction des toiles récentes.
Figures du vertige Plus fourmis que jamais, les personnages envahissent, aujourd’hui, tout l’espace de la toile, le parsemant tel un semis, hypnotique et cinétique. Figures, ce sont surtout des signes, dont la multiplication provoque un effet hallucinogène. Tout est ici d’autant plus relatif que tout est visiblement infini. Dans ces oeuvres, il n’y a plus de plus court chemin, plus de perspective, rien que de la dérive. La foule mouchette le néant, dans une logique apparentée à celle du « all-over » pratiqué par le peintre américain Pollock il y a un demisiècle, ou par le minimaliste français Viallat voilà trente ans. Il s’agit d’une forme d’écriture automatique destinée à conjurer l’absence, à partir de lettres d’un curieux alphabet, constitué ici de petits hommes, de petites chaises, de petites maisons ou encore de petits chiens ; d’un petit monde quasiment vu d’avion, ou du moins d’une fenêtre haute. Aucune lettre n’est reliée à sa voisine. Calligraphie de la solitude et de la déambulation, incarnation de l’existence « dans le calme et l’incommunication », l’ensemble provoque un vertige que seul tempère l’allure ludique des êtres dessinés.
« Je ne peux pas m’empêcher de faire un clin d’oeil », conclut Seguí. Comme pour s’excuser de donner de notre monde une vision désespérée, il s’applique en effet, plus que jamais, à ne pas faire
des humains des héros. Mais des acteurs, des clowns, tout au plus. La divine comédie est terminée depuis longtemps, mais la comédie humaine n’en finit pas d’être rejouée. Si le percevoir peut nous éprouver, lorsque Seguí le sublime, cela nous donne envie de sautiller. Encore et encore. "
Catherine Plassart
voir aussi :
>>> le site d'Antonio Segui
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Lithographie originale tiréeà part du cahier d'art "En Puisaye" N°9 et gravures originales eau-forte et aquatinte.
voir les estampes
Bibliographie sélective
Antonio Segui
La cité chimérique
"En Puisaye" cahier n° 9.
éditions RLD 2001
(Diffusion Art Point France)
Bibliographie
éditions originales et monographies
Contribution à l'énigme
Jacques Audiberti
Dessins d'Antonio Seguí
Fata Morgana, Montpellier, France, 2005.
Les Bateleurs
Vincent Pachès
Gravures d'Antonio Seguí
Editions Tandem, Belgique, 2005
Gradiva Seconde
Caroline Fourgeaud-Laville
Dessins d'Antonio Seguí
Fata Morgana, Montpellier, France, 2005
Soif
Cristina Castello
Poèmes
Illustré par Antonio Seguí
L'Harmattan, Paris, France, 2004.
Les rougets
André Pieyre de Mandiargues
Dessins d'Antonio Seguí
Fata Morgana, Montpellier, France, 2004.
L'Illuminé
Gonzalo Rojas
Traduit de l'espagnol (Chili) par Jean Portante
Pastels d'Antonio Seguí
Portrait photographique par Mohror
Myriam Solal, Paris, France, 2003.
Raspoutine
Guillaume Apollinaire
Dessins d'Antonio Seguí
Fata Morgana, Montpellier, France, 2003.
Le Voyage
Héctor Tizón
Traduit de l'espagnol (Argentine) par Françoise Campo-Timal
Illustration de couverture d'Antonio Seguí
Actes Sud, Arles, France, 2003.
Beauténébreux
José Bergamín
Traduit de l'espagnol par Florence Delay
Eauforte d'Antonio Seguí
La Délirante, Paris, France, 2002.
Repaires
Vincent Pachès, Antonio Seguí
Préface d'André Balthazar
Eau-forte d'Antonio Seguí
Le Daily-Bul, La Louvière, Belgique, 2002.
Le Promeneur de Córdoba
Jean Cortot
Lithographies d'Antonio Seguí
Maeght Editeur, Paris, France, 2001.
La Cité Chimérique
Gilbert Lascault
Lithographies d'Antonio Seguí
Cahier d'art «en Puisaye » n°9
Editions Robert et Lydie Dutrou, Parly (Yonne), France, 2001.
Architecture Sereine du Vide
Roberto Di Pasquale
Traduit par Philippe Delaveau
Vignette de couverture d'Antonio Seguí
Eau-forte rehaussée à l'aquarelle d'Antonio Seguí
Collection Double Hache
Editions Dumerchez, Reims, France, 2001.
El hombre de la corbata roja
Natalia Kohen
Eau-forte Gauchos preparándose para liquidar al hombre de la corbata roja
Antonio Seguí
Imprenta Ideal, Buenos Aires, Argentine, 2000.
Seguí et Carlos Semprun Maura
Antonio Seguí au bistrot , Carlos Semprun Maura
Carnet de dessins , Antonio Seguí
Collection Carnets de dessins, Editions La Main Parle, Paris, France, 2000.
La Sardine
Homero Aridjis
Traduit de l'espagnol par Irma Sayol
Illustré par Antonio Seguí
Fata Morgana, Montpellier, France, 2000.
Sonnets Lyriques
Luis de Camoens
Traduit du portugais par Frédéric Magne
Frontispice d'Antonio Seguí
La Délirante, Paris, France, 2000.
À l'Ombre-Ville
Vincent Pachès
Eaux-fortes d'Antonio Seguí
Maurice Felt Editeur, Dinard, France, 1999.
Rébus sans Réponse
Jacques Meunier
Illustré par Antonio Seguí
Le Salon d'Art, Bruxelles, Belgique, 1999.
L'Ile de l'Insomnie
Jacques Meunier
Illustré par Antonio Seguí
(imprimé en sérigraphie par France Marquage, Nancy, France)
Editions Christophe Berteaux, France, 1999.
El Hombre Que Está Sólo y Espera (Fragmentos)
Raul Scalabrini Ortíz
Eaux-fortes d'Antonio Seguí
Artesanías Gráficas S.R.L., Buenos Aires, Argentine, 1998.
Le Chapeau Vert de Juanito
Jean-Loup Philippe
Illustré par Antonio Seguí
Editions Robert et Lydie Dutrou, Parly, France, 1998.
Vol Captif/Vuelo Cautivo
Hugo Herrera
Traduit par Claude Couffon
Illustré par Antonio Seguí
Antoine Soriano Editeur, L'Hay-les-Roses, France, 1997.
Enfers Bouffons ou La Nuit du Satan Démon
Gilbert Lascault
Dessins d'Antonio Seguí
Fata Morgana, Montpellier, France, 1996.
Cobalt
Carlos Semprun Maura
Illustration d'Antonio Seguí
Moraïma, Paris, France, 1996.
Elle
André Balthazar
Images d'Antonio Seguí
Collection Babil, Le Daily-Bul, La Louvière, Belgique, 1995.
Les Allusions
Roberto Di Pasquale
Traduction : Denys Bélanger
Illustré par Antonio Seguí
Ecrits des Forges, Trois Rivières, Québec, 1994
Les Forêts de la Mémoire
Jean-Loup Philippe
Illustré par Antonio Seguí
Manière Noire Editeur, Paris, France, 1994.
Les Mots Perdus
Albert Palle
Dessins d'Antonio Seguí
Moraïma, Paris, France, 1994. Les Forêts de la Mémoire
Interprétation du Tango
Ramón Gómez de la Serna
Traduit par Danièle Robert
Illustré par Antonio Seguí
André Dimanche Editeur, Marseille, France, 1993.
Cahiers de la Tauromachie 1
Ave Caesar
Camilo José Cela
Antonio Seguí (lithographie tirée sur les Presses de Clot, Bramsen & Georges)
Jannink - Soriano, Paris, France, 1993.
Rythmes Rouges
Jorge Luis Borges
Traduit de l'espagnol par Jean-Pierre Bernès
* Eaux-fortes d'Antonio Seguí
La Délirante, Paris, France, 1992.
The Messenger
Poème de Dimitri T. Analis
Traduite du français par John Taylor
Gravures d'Antonio Seguí
(tirées sur les presses de l'Atelier Elsa Ancia)
Alcyon Art Editions, Londres, Grande-Bretagne, 1992.
Le Manteau de Laocoon
Démosthènes Davvetas
Poèmes
Traduits du grec par Xavier Bordes
Gravure d'Antonio Seguí
Editions Galilée, Paris, France, 1991.
Alcools et Calligrammes
Guillaume Apollinaire
Texte présenté par Claude Debon
Illustrations d'Antonio Seguí
Imprimerie Nationale Editions, Paris, France, 1991.
Le Froid Bleu des Contre-Nuits
Une légende de Gilbert Lascault
Sept lithographies d'Antonio Seguí
Editions Atelier Clot, Paris, France, 1990.
Jeux de Plage
Gilbert Lascault
Antonio Seguí
Gravures Tandem 74, Gerpinnes, Belgique, 1990.
Trois Refrains
André Velter
Antonio Seguí
Fata Morgana, Montpellier, France, 1989.
Los Bares/Les Bars
Poème d'Arnaldo Calveyra
Traduit par Laure Bataillon
Eau-forte d'Antonio Seguí
(imprimée par Thierry Bourquin)
Editions Les Yeux Ouverts, Genève, Suisse, 1988.
Conférence sur la Protection de l'Animal
James Ensor
Antonio Seguí
Editions La Pierre d'Alun, Bruxelles, Belgique, 1985.
Paysages habités
André Balthazar
Antonio Seguí
Editions du Soleil de Minuit, Bruxelles, Belgique, 1981.
L'Enfance de l'Age
André Balthazar
Antonio Seguí
Le Daily-Bul, La Louvière, Belgique, 1981.
L'Eléphant des Pampas
Max Clarac Sérou
Lithographies d'Antonio Seguí
Saldan Editions
Imprimerie Clot, Bramsen et Georges, Paris, France, 1978.
Plaine Blanche
Poèmes de Silvia Baron Supervielle
Gravures d'Antonio Seguí
Editions Carmen Martínez, Paris, France, 1978.
Monographies
« Antonio Seguí »
Jacques Meunier
Editions Ides & Calendes, Neuchâtel, Suisse, 2000.
« Seguir ? . Seguí »
Daniel Sibony
Editions du Cercle d'Art - Expression Contemporaine, Paris, 1997.
Conversation
Antonio Seguí avec Eddy Devolder
Editions Tandem, Gerpinnes, Belgique, 1989.