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FRANTA est né en 1930 à Trébic (Moravie), en Tchécoslovaquie. |
Textes
Le geste de Franta, l'étendue de son oeuvre.
Comme un serment qui fonde un monde nouveau l'oeuvre de Franta (peinture et sculpture assemblées) le rattache symboliquement à une origine incontestée , celle des propagateurs de mythes universels dédiés à la grandeur de l'humain. La raison première de cette visée trouve sans nul doute sa justification dans l'esclavage d'une humanité qui contre son gré est née serve et "éduquée" de même. Celle-ci , d'Europe ou d'Afrique, a su paradoxalement se distinguer parfois des fêtes morbides.
L'éblouissement pérenne que l'on éprouve devant le dessin de ces êtres en "méditation" laisse tout d'abord une trace indélébile et convaincante dans les esprits. Ainsi se développe en profondeur l'acte fondateur, la communion instauratrice d'un sens renouvelé . Non pas l'écume clinquante et vite envolée sur la vague du temps des modes éphémères, mais le dur noyau, le foyer incandescent d'une promesse que l'Histoire devra tenir. Le passage des jours devant une "Femme à genoux" (2002), sculpture en bronze, scandé par le calendrier passionné d'un "Homme au repos" ( acrylique sur toile, 2003) sont conformes aux exigences de l'amour et prennent origine dans l'utopie de l'ère nouvelle. Le dessin, la ligne continue, la fidélité à la marque de la Rencontre...
Car Franta a connu, c'est sûr, les foules enfiévrées et le lien indissociable contracté avec les hommes et les femmes décidés à suivre la voie d'une nouvelle alliance. Son acte est donc bien celui d'un serment. Ni bref, ni inscrit dans la seule minute, il a engagé sa vie et l'a liée à des énergies. Il a lutté contre la dispersion, jusqu'au vertige intérieur de la création où le plaisir, la jubilation, la jouissance des feux de l'oeuvre dans le jour, la nuit, le souvenir des instants élus font date.
L'art est ici une cérémonie sacrée car il instaure d'en haut, depuis on ne sait quelle transcendance, les insignes surnaturels du pouvoir créateur. Le serment de Franta, sa création sont vraisemblablement reçus du ciel. Volonté singulière à généraliser dans la vie évidemment. C'est du fond de sa conscience que l'homme-artiste a énoncé une parole redite ensemble. Car il a su trouver la source, il a vécu dans l'exaltation archaîque partagée. Il a instauré un avenir en dernier lieu. Acteur du XXème puis du XXIème siècles, désormais Franta invente un futur éternel qui commence avec la souveraineté du présent, sans course à l'innovation mais pour réactualiser encore l'origine oubliée.
Pierre Givodan (Art Point France Info avril 2009)
Voyage de l'autre côté
Il aurait longtemps rêvé à un autre monde. Il se serait inventé une mémoire un récit, pour aller voir de l'autre côté. Dans ce continent, ces pays de l'homme nu. Là où personne n'est étranger.
Il avait découvert l'art éternel. La peinture, la gravure, la sculpture. Il lui avait fallu souvent, commencer puis regarder derrière. Il a essayé de comprendre, en souvenir de l'Universel, ce qui hausse le particulier dans une oeuvre.
La victoire de Franta, son périple vers les époques de l'Homme premier, sa naissance au désir d'Afrique ou d'ailleurs vient de là . De ce moment qui ne peut être oublié. Celui d'une Origine peut-être, ou encore d'une dispersion, et d'un éclat de colère.
Pendant des années il aura étudié les corps, les postures, uni par ce rêve d'éxilé.
Les vues de ce nouveau monde, cette nature trop riche, ce pays immense, n'appartiennent qu'à lui. Il nous a montré l'intérieur d'un continent. Il a regardé la lumière, senti le vent, bu l'eau s'est enfoncé dans l'épaisseur de la forêt. Il a échangé son savoir contre la remontée du temps, à la recherche du mythe. Europe, Afrique, destination les grands fleuves et les hautes terres.
Tout cela il l'a compris en voyageant. Loin des folklores et des prisons.
Là-bas, cet autre monde est heureux. Là-bas les compagnons sont inséparables. Là-bas l'Européen marche sous le soleil.
Les peintures que l'on regarde ne sont d'aucune carte. Les horizons lointains et les ciels vastes sont étendus à perte de vue. L'harmonie des rythmes se cultive avec celle des corps. L'immensité se découvre à chaque instant dans cette représentation de la vie où l'homme est changé.
Monde humain et sauvage, d'amour et d'aurore. A l'intérieur des terres blanches où sont enlacés les derniers murmures. Mémoire diffuse et de la plénitude, grâce des sorciers qui passionnent cet archéologue de l'avenir. Comme si le présent seul demeurait.
Pierre Givodan dans ( Art Point France Info mai 2007)
voir aussi :
>>> la vitrine de Franta dans Art Point France
>>> le site personnel de l'artiste
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Texte
L'Homme vulnérable de Franta.
Désert, espace minéral sans fin, aux formes et aux couleurs changeantes. Au gré du vent, le tapis de sable ondule, les dunes se recomposent et dans cette instabilité du paysage non réductible à une seule image, l'homme de Franta semble moins conscient de sa finitude que de sa vulnérabilité.
Lavis, encres de Chine, huiles, bronzes montrent des hommes et des femmes, assis, accroupis ou debout. Peu importe leur posture, ils sont seuls. L'artiste les isole cherchant à faire acte de connaissance intime. Il les consigne dans un éternel présent et tente de saisir leur quintessence d'individu. Nus, recouverts de terre grise ou ocre, ils possèdent la beauté de ceux qui n'ont jamais à lutter contre eux-même.
Né en 1930 à Trebic, Franta fuit Prague en 1958 pour vivre et travailler en France où il se sent chez lui. Pourtant ce qui a été perdu, trahi ou bafoué ne trouve pas de consolation dans le pays de la vieille Europe. Depuis le début des années 80, l'artiste qui a beaucoup voyagé, a rencontré la terre qui guérit. Il séjourne régulièrement en Afrique Noire et dans le Sahara marocain, algérien ou tunisien.
Catherine Plassart (Art Point France Info mars 2010)
Publications
Franta , Texte de Jean-Luc Chalumeau, 152p. , Broché 25 x 28 cm Somogy Editions d'Art (2007).
Visages de la barbarie .
Dans son texte sur Franta, Jean-Luc Chalumeau écrit : "I l n'y a qu'une question fondamentale, à laquelle aucun philosophe, aucun artiste n'échappe, celle dont la morsure est à l'origine de sa vocation de penseur ou de créateur, c'est à-dire : qu'en est-il du mal ? "
Il est clair que le XX ème siècle a été en même temps que le siècle de l'entrée de toute la planète dans la modernité celui de la chute dans la barbarie. La banalisation de la violence organisée scientifiquement, l'instrumentalisation de l'homme, la radicale négation de toute conscience morale ont fait le reste.
Il ne s'agit pas ici de faire le procès de l'histoire et Chalumeau, citant Camus à la fin de son essai, prend la peine de se référer à l'auteur de l'Homme Révolté, livre qui est un appel à la lucidité devant ce qu'en un autre temps on appelait la croyance en l'Histoire, c'est à dire la religion du progrès, entendu comme marche de la Raison "instrumentale". On en a voulu à Camus dans les années cinquante pour avoir, à la suite de Nietzsche, dénoncé cette foi nouvelle qui faisait face à l'ancienne. Aujourd'hui plus personne ne nie le prophétisme d'un tel diagnostic. Et Camus, Orwell, font désormais figure de classiques de la pensée anti-totalitaire.
Il reste que la question du mal historique demeure pour une part notre impensé, car elle ébranle le socle de notre civilisation occidentale érigée depuis la Renaissance sur l'idée d'ailleurs louable d'émancipation de l'homme. C'est là que l'artiste intervient dans le débat et qu'il joue un rôle critique que souligne Chalumeau.
Le sens du beau, celui de l'Humain et du terrestre nous rappellent sans cesse à ce que Camus nommait dans le même livre "la pensée des limites". Héraclite en effet nous avait averti il y a des millénaires. L'oubli de la mesure favorise le déchaînement et la furie. Le mal gît dans cet exercice de la liberté mal comprise. L'énigme du mal dont parlait Kant est bien en nous la preuve de notre liberté. A nous d'être à la hauteur de la tâche d'approcher "l'humanité de l'homme" pour plagier ce dernier. Franta par sa peinture et sa sculpture ne dit rien d'autre.
L'exposition monographique du peintre français d'origine tchécoslovaque FRANTA, à la Chapelle de l'Observance à Draguignan du 18 octobre au 1er décembre 2007 est aussi l'occasion d'une présentation du superbe ouvrage (texte de Jean-Luc Chalumeau ) que les éditions Somogy consacrent à l'artiste.
Pierre Givodan (Art Point France Info octobre 2007)
"FRANTA", textes de Evelyne Artaud, Extraits de textes de Pierre Gaudibert, G.Gassio-Talabot, Marc Le Bot, J.L.Chalumeau, Charlotta Kotik / Brooklyn Museum, NY, Luis Cancel / Bronx Museum of the Art, NY, Dore Ashton, Satoshi Yamada / Musée d'art de Nagoya Japan, Paris 2000 146 illustrations dont 92 couleurs Editions Cercle d'Art
"FRANTA", Peintures et travaux sur papier par Bernard NOEL, introduction de Thomas Messer, publié avec le concours du ministére de la culture (FIACRE), 1987 109 illustrations dont 52 couleurs Mage publisher inc. Washington DC
"FRANTA, travaux sur papier et peintures", entretiens avec Michèle Demoulin, CAHIER 4, 1981
36 illustrations dont 12 couleurs Editions Limage / Alin Avila
"FRANTA, PARCOURS 1968/1979"
Textes de J.L.Chalumeau, Pierre Gaudibert, G.Gassio-Talabot, J.J Lévéque, Frantisek Smejkal, Anne Tronche, J.L Pradel, 1979
24 illustrations couleurs Collections Parcours / Edition Theiner